Et si notre planète était menacée non seulement par l’indéniable, l’indiscutable et visible réchauffement climatique mais également par un mal plus pernicieux : la glaciation éthique ?
J’ai écouté les nouvelles à la radio ce matin, comme hier, comme demain. Les nouvelles n’étaient pas reluisantes.
Sur le vieux continent, les populistes s’installent lentement mais durablement, au cœur du paysage politique. L’idée d’une démocratie sans libertés fait doucement son chemin : ne compterait plus que la voix du peuple, voix de Dieu ! Et l’ignominie ne serait plus une monstruosité si voulue par la loi du nombre, si plébiscitée par le vote populaire. Que les choses continuent ainsi et un bon matin, le droit sera jeté par-dessus bord comme on jette à la poubelle un objet désuet et encombrant. Dirons-nous un jour : Nous avions toutes les libertés, et puis quelque part, sur le bord des chemins, évaporées, nous les avons perdues de vue ? Doucement mais définitivement perdues de vue ?
Et l’extrême droite qui relève la tête en Allemagne et défile à Chemnitz, le costume des temps ténébreux, le regard mauvais. Et le parti travailliste britannique, un grand parti de gouvernement, miné par l’antisémitisme. On a beau savoir, on oublie souvent: à chaque siècle, cette haine revient toujours le visage parfois refait, mais irrémédiablement habitée par les mêmes obsessions.
J’ai écouté les nouvelles à la radio ce matin, comme hier, comme demain. Les nouvelles n’étaient pas bonnes.
Au Venezuela, ce n’était pas la ballade des gens heureux et au Nicaragua, le pouvoir se réclamant du peuple tirait sur le même peuple, l’accusant de haute trahison contre … le peuple. Les Muchachos du Front Sandiniste devenus tout aussi féroces que le tyran combattu autrefois.
Mais pourquoi donc les combattants de la liberté, une fois le pouvoir conquis, se transforment-ils, souvent en implacables ennemis de la liberté ? Pourquoi donc les révolutionnaires finissent-ils souvent si mal, vociférant des vieux slogans, obsédés à chaque levée de soleil, non pas par ce qu’il faudrait entreprendre pour améliorer la vie quotidienne de leurs contemporains, mais par la conservation de leur pouvoir, y compris au prix du sang versé ?
Sur le vieux continent, les populistes s’installent lentement mais durablement, au cœur du paysage politique
J’ai écouté les nouvelles à la radio ce matin, comme hier, comme demain. Les nouvelles n’étaient pas joyeuses.
Du côté du Levant, du côté de l’Asie, les indicateurs économiques semblent prometteurs, mais les gens, eux, vont-ils vraiment bien ? Comment vont les Rohingyas ? Comment vont ceux de Pyongyang ? Comment vont les pauvres du Bangladesh ? Comment vont les femmes de Téhéran ? Comment vont les intouchables de Bombay ? Le Levant est-il vraiment ce pays aux matins calmes de nos fables et contes de mille et une nuits ?
J’ai écouté les nouvelles à la radio ce matin, comme hier, comme demain. Les nouvelles n’étaient pas de soleil.
Encore des jeunes africains échoués sur les côtes du vieux continent. Les jeunes africains qui regardent vers l’Europe et les Etats-Unis et l’Afrique des Chefs qui regarde vers Beijing. La fable : des milliards de dollars chinois en pagaille, en prêts sans conditions, quand on veut, autant que l’on veut. Le souci : les prêts sans conditions cela n’existe pas. Excepté évidement dans les contes de fée. « Car c’est celui qui paie les musiciens qui décide in fine du programme du bal », dit l’adage. Les prêts sans conditions ne sont pas des prêts humanitaires, les prêts sans conditions ne sont pas des prêts sans intérêts.
Hey Jude, don’t make it bad, Take sad song and make it better
J’ai écouté les nouvelles à la radio ce matin, comme hier, comme demain. C’était la fin de l’été. La canicule avait sévi.
« Notre Maison commune brûle et nous regardons ailleurs », dit Chirac à Johannesburg. Et si notre planète était menacée non seulement par l’indéniable, l’indiscutable et visible réchauffement climatique mais également par un mal plus pernicieux : la glaciation éthique ? La glaciation éthique globale. C’est-à-dire cette habitude, cette mauvaise et corrosive manie à oublier la sacralité de la dignité de chaque personne humaine, cette maladie de l’indifférence à notre commune humanité.
J’ai écouté les nouvelles ce matin, et saturé des vibrations négatives, j’ai éteint mon poste radio. J’ai pris mon portable, mis un casque, switché sur une application musicale, cliqué sur les Beatles. Hey Jude ! Il y a cinquante ans, naissait un groupe mythique : les Beatles. John Lennon, Paul McCartney, George Harrison et Ringo Starr, quatre garçons magiques dans le vent imaginant en mélodies inoubliables notre planète plus joyeuse, plus habitable, plus civilisée… Hey Jude, don’t make it bad, Take sad song and make it better ; Hey Jude, ne gâche pas tout, Prend une chanson triste et rend la meilleure.