Professeure, autrice, philosophe, l’œuvre de Maryse Condé se situe entre fiction, autobiographie et essais. Retrouvez une sélection de cinq livres de cette autrice majeure.
Née Maryse Boucoulon en 1934 à Pointe-à-Pitre dans une famille aisée, sa mère est institutrice et son père banquier, Maryse Condé part à l’âge de 16 ans étudier au lycée Fénelon, à Paris. Elle suivra ensuite un cursus de Lettres modernes à la Sorbonne. Sa découverte des poètes de la négritude, en particulier Aimé Césaire “pour la beauté et la puissance de son œuvre“, puis la pensée “lucide” de Frantz Fanon, lui ouvrent une nouvelle perspective sur sa condition.
Celle qui n’avait jamais entendu parler d’esclavage débute une quête identitaire qui l’a conduira en Afrique. “Ce retour en Afrique m’a permis de m’assumer en tant que femme noire et de devenir cet écrivain que je suis devenue“, dira-t-elle dans une interview.
Maryse Condé : un destin d’écrivain
En 1960, elle part avec ses enfants enseigner en Guinée, au Ghana et au Sénégal. De retour en France en 1970, elle reprend ses études et travaille pour la revue Présence Africaine. Cinq ans plus tard, elle obtient un doctorat en littérature comparée. Sa carrière de romancière débute en 1976 avec la publication de son premier roman, “Heremakhonon”.
Mais c’est aux États-Unis, et notamment à la Columbia University (New York), où Maryse Condé dessinera sa carrière littéraire de renommée mondiale. En 2004, elle devient la première présidente du Comité pour la Mémoire de l’Esclavage, puis prend sa retraite l’année suivante. Couronnée de nombreuses distinctions, l’écrivaine, qui a longtemps partagé son temps entre son île natale et New York, se retire en Provence, à Gordes.
De l’écriture autobiographique au roman fantastique, Maryse Condé aborde différents thèmes : la famille, l’esclavage, l’exil, la rébellion, le rôle des femmes. Maryse Condé s’est éteinte le mardi 2 avril 2024 à l’âge de 90 ans.
Ségou, 1984 (Robert Laffon)
Composé de deux tomes, Les Murailles de terre (1984) puis La Terre en miettes (1985), Ségou est une magnifique fresque historique qui raconte le destin d’une famille de nobles bambara, la famille Traoré, sur plusieurs générations. Cette saga retrace quatre événements majeurs s’étalant sur deux siècles : la traite de l’esclavage, l’influence de l’islam, du christianisme et de la colonisation. Premier best-seller de Maryse Condé.
Moi, Tituba, sorcière, 1988 (Galimard)
Tituba, née esclave à la Barbade à la suite d’un viol, est initiée aux pouvoirs surnaturels par Man Yaya, guérisseuse et faiseuse de sorts. Son mariage avec John l’entraîne à Boston, puis au village de Salem. Accusée de sorcellerie, elle s’attire les foudres des fondamentalistes religieux et devient un bouc émissaire. Pour ce roman, Maryse Condé s’est inspirée d’un personnage historique réel, Tituba, jugée au procès des sorcières de Salem en 1692, pour redonner une voix à l’une de celles qui ne l’ont jamais eue.
Le Cœur à rire et à pleurer, 1999 (Robert Laffon)
Premier récit autobiographique qui relate sa jeunesse dans la Guadeloupe des années 50. Elle évoque ses relations houleuses avec sa mère, sa confrontation à la mort, le racisme, ses désillusions amoureuses, ses rêves de liberté et d’autonomie. Récit d’enfance et de jeunesse qui questionne l’identité -être guadeloupéenne, noire, et Française- et qui éclaire les thèmes chers à l’auteur.
Histoire de la femme cannibale, 2005 (Gallimard)
Jeune peintre d’origine guadeloupéenne, Rosélie a quitté son île pour suivre son premier amour en Afrique du Sud. Abandonnée par cet homme, elle rencontre Stephen à l’université du Cap. Pendant vingt ans, le couple mixte coulera des jours heureux. Dans cette Afrique du Sud post-apartheid, l’assassinat de Stephen sonnera le glas de ce bonheur. Dans un style flamboyant et vigoureux, Maryse Condé livre un réquisitoire passionné contre le racisme et la ségrégation.
Le fabuleux et triste destin d’Ivan et Ivana, 2017 (JC Lattès)
Les jumeaux Ivan et Ivana sont nés de l’union d’une Guadeloupéenne et d’un Malien, musicien et poète. Devenus adolescents, ils débarquent au Mali, dans la famille de leur père. Ivan se radicalise et devient terroriste. Pour son 22e livre, la romancière s’interroge sur les phénomènes de radicalisation et particulièrement l’attentat de Montrouge, lorsque la policière martiniquaise Clarissa Jean-Philippe fut abattue par Ahmed Coulibaly. Pour Maryse Condé, ce livre est l’occasion d’analyser ce qu’est devenu le mythe de la négritude.